En France, près d’un salarié sur deux estime avoir déjà été témoin d’un comportement contraire à l’éthique sur son lieu de travail, selon un sondage IFOP de 2023. Des règles internes existent pourtant dans la quasi-totalité des grandes entreprises, mais leur application reste inégale et parfois peu contraignante.
Les conséquences de ces dérives se traduisent par une augmentation de l’absentéisme, une perte de confiance interne, des risques juridiques accrus et une détérioration de l’image de l’organisation. La vigilance face à ces pratiques s’impose désormais comme un impératif pour la pérennité et l’attractivité des entreprises.
Manque d’éthique en entreprise : de quoi parle-t-on vraiment ?
Ce qu’on nomme manque d’éthique en entreprise ne se résume jamais à quelques dérapages ponctuels. Il s’agit le plus souvent d’une mécanique installée, faite de décisions tordues, de valeurs placardées sans jamais descendre dans la réalité et d’un management préférant l’ombre à la transparence. Cette notion, mouvante, change de contours selon la culture de la boîte, le secteur, ou même le pays, ce qui la rend parfois difficile à saisir.
En pratique, on voit le manque d’éthique ressurgir dans une foule de situations qui mettent à mal les valeurs morales et éthiques attendues au travail. Une promotion qui favorise l’ami d’un supérieur, des chiffres “ajustés” pour polir l’image, des secrets confiés aussitôt éventés, ou des promesses faites aux salariés qui restent lettres mortes, rien de tout cela n’est toujours prémédité, mais souvent conséquence d’une gouvernance à la dérive, d’une obsession du résultat ou simplement d’une culture d’entreprise sans foi ni loi recognisable.
Prenez la manière dont les décisions sont tranchées : elle en dit long. Là où l’éthique pèse réellement, le rendement pur n’a pas toujours le dernier mot. On s’attarde à mesurer la portée, à mettre les choix à l’épreuve des principes. Reconnaître les dilemmes, ouvrir la discussion sur les points sensibles, autant de marqueurs d’une maturité éthique qu’aucune charte ne garantit par magie.
Ce socle professionnel, il ne se décrète pas. Il se construit petit à petit par la cohérence managériale, des formations vécues sur le terrain, des règles du jeu sans ambiguïté, une direction à l’épreuve des faits. À l’inverse, quand la cohésion s’effrite, on assiste au retour en force de l’injustice, de la suspicion et du chacun pour soi.
Quels sont les risques concrets pour l’organisation et ses collaborateurs ?
Le manque d’éthique en entreprise agit comme un feu qui couve : tout paraît stable, mais la structure s’use et les équipes se fragilisent. Dès lors que les repères se désagrègent, la confiance s’évapore. Les équipes perdent leur unité, la motivation vacille. Une ambiance de soupçon s’installe et, très vite, les désengagements se multiplient.
La santé mentale des salariés encaisse le choc. Pression malsaine, passe-droits, manque de reconnaissance : tout cela alimente une vague de risques psychosociaux. Stress chronique, fatigue accumulée, anxiété rampante, et ce qui devrait être une source de réalisation personnelle peut vite devenir un facteur d’épuisement.
Pour donner un aperçu des répercussions observées quand l’éthique s’évanouit, voici ce qui ressort le plus souvent :
- Réputation de l’entreprise sérieusement entamée
- Arrêts maladie qui se multiplient
- Départ accéléré des profils les plus recherchés
- Ambiance interne tendue, climat pesant et risques accrus sur la sécurité humaine
Pour repérer ces signaux, il s’agit d’être attentif dès les premiers symptômes : réclamations répétées, tensions latentes, initiatives qui se font rares. Chaque détail du quotidien peut être révélateur d’un malaise en profondeur. Cette attention doit exister à tous les échelons de l’organisation, du manager à la direction générale.
Agir avant que la situation ne dégénère consiste à soigner la prévention et à porter une réelle attention à l’environnement de travail. Les salariés ont besoin d’indicateurs clairs, d’écoute sans faux-semblant, de justice dans le traitement de chacun. Prendre soin de la santé au travail est bien plus qu’une affaire de RH : c’est le socle même de la solidité collective.
Favoriser une culture éthique : leviers d’action pour un management responsable
Le management détient un rôle structurant qui engage bien au-delà des discours : il modèle, jour après jour, la culture d’entreprise. Entre les paroles affichées et les actes quotidiens s’ouvre parfois un gouffre ; les valeurs morales et éthiques doivent se vivre sur le terrain, pas se décliner sur une affiche.
Opter pour la clarté dans les échanges, c’est jeter la première pierre. Une charte éthique lisible, adoptée par tous, pose un cadre. Mais ce texte, s’il n’est que littérature, n’a guère d’effet sans formations fréquentes et adaptées au quotidien du monde du travail. Les salariés attendent plus que des symboles ; ils veulent des outils pour agir à bon escient, dès que la situation se tend.
Trois leviers à activer :
Voici trois leviers qui aident le management à incarner l’éthique jour après jour :
- Gouvernance exemplaire : tout part de l’exemple donné par le sommet. Un seul faux pas en haut de la pyramide et tout l’édifice vacille.
- Outils d’alerte fiables : permettre de signaler les comportements à risque via des dispositifs indépendants, confidentiels et sans crainte de retour de bâton.
- Valorisation des comportements responsables : souligner et récompenser tout ce qui renforce la responsabilité sociale et la cohésion collective, bien au-delà de la seule performance individuelle.
Une démarche sérieuse de prévention et de maîtrise des risques s’appuie donc sur la cohérence des pratiques RH, alliées aux ambitions du développement durable et à l’esprit de responsabilité sociale. Le collectif se renforce par le dialogue, la limpidité des échanges et le respect réciproque, pas seulement à travers les process ou les règlements internes.
L’éthique, en réalité, ne s’impose jamais une fois pour toutes. L’entreprise qui ferme les yeux laisse la défiance grandir, parfois jusqu’à la rupture. Mais celles qui relèvent le défi forment des équipes soudées, prêtes à affronter tempêtes et crises sans jamais perdre leur boussole.